Le 28 mai 2002, à Rome, sest tenu le dernier sommet
qui réunissait lO.T.A.N. et lUnion Européenne.
Lenjeu de cette réunion des 19 membres de lAlliance
était considéré comme historique par la présence
même de Vladimir Poutine. Ainsi, lissue de ce sommet,
sans réelle surprise, a permis dinitier la création
dun nouveau conseil O.T.A.N.-Russie en matière de stratégie
économique et militaire. Chacun sest félicité
du caractère profondément symbolique de cette union
qui jette définitivement les fantômes de la guerre
froide aux oubliettes en même temps quelle devrait ouvrir
les perspectives dune coopération plus étroite
entre lOuest et lEst. La création de ce conseil
place, de ce fait, la Russie et les autres membres de lAlliance
sur un pied dégalité en ce qui concerne les
décisions clés qui pourraient êtres prises en
son sein. Rappelons seulement quil y a 5 ans, en 1997, les
différents chefs dEtats des pays membres de lO.T.A.N.
avaient déjà signé avec Boris Eltsine «
lacte fondateur » qui devait mettre fin à 40
années de tensions entre les deux blocs : cétait
le PJC (Conseil Conjoint Permanent), un outil qui devait permettre
la gestion commune des crises. Cet accord venait, en réalité,
adoucir une tension qui sintensifiait à cause de lélargissement
de lO.T.A.N. à trois nouveaux pays : la Pologne, la
Hongrie et la République Tchèque. Ne nous y trompons
pas : la création du Conseil de Rome prépare de manière
diplomatique lentrée en novembre 2002 de lUkraine
et dautres pays de lancienne U.R.S.S. au sein de lAlliance...
Au milieu de toutes les déclarations pompeuses
qua suscité cette entente avec la Russie, une voix
sest également élevée, en la personne
de Mme Elisabeth Andersen, directrice exécutive de Human
Rights Watch Europe (H.R.W.), au nom de la défense des droits
humains. Elle a appelé les responsables européens,
membres de lO.T.A.N., à considérer la Russie
et son président comme peu dignes de faire partie de ce conseil
à cause des exactions meurtrières commises en Tchétchénie
par les forces armées russes. Sappuyant sur le refus
qui avait été fait à la Croatie dintégrer
lAlliance jusqu'à ce quun rapport soit établi
sur la responsabilité de certains généraux
croates impliqués dans des crimes de guerres, H.R.W. a exigé
qu'il en soit de même pour les violations des droits humains
et les crimes perpétrés par larmée russe
en Tchétchénie. Dans une lettre adressée aux
membres de lO.T.A.N. et de lUnion Européenne,
Human Rights Watch déclarait que les abus de larmée
russe en Tchétchénie venaient entacher le cur
même des valeurs et des objectifs stratégiques des
deux institutions. « Si lO.T.A.N. reste silencieuse,
alors lentrée de la Russie changera le visage de lAlliance
» avait ajouté Mme Andersen. Malgré les appels
répétés de Human Rights Watch auprès
des Etats membres demandant des comptes à Vladimir Poutine
quant à sa politique militaire inhumaine en Tchétchénie,
les oreilles sont restées sourdes et les voix ne se sont
pas élevées.
Aurions-nous besoin de le réaliser encore : les intérêts
économiques et militaires sont infiniment plus importants
que les intérêts humains. Les tenants et les aboutissants
de ce sommet en sont la preuve flagrante : il s'agit ni plus ni
moins de la lutte contre le terrorisme islamiste par
lunion des élites terroristes occidentales. Le combat
contre le terrorisme de surface par le terrorisme souterrain, la
guerre contre la guerre, le mal contre mal. Lun
est la source et la raison dêtre de lautre. Et
quand on y regarde de près, le sang versé par les
terroristes islamistes est de la même couleur
que le sang répandu sur les mains des chefs dEtats,
membres de lO.T.A.N. Ceux qui sont censés protéger
le droit et promouvoir le respect de la vie humaine par le biais
dalliances plus ou moins fumeuses nont pas
eu à se forcer pour accueillir une brebis galeuse
dans leur troupeau. Non, ils ont simplement ouvert la porte à
lun des leurs !
Thierry Robin - juin 2002
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