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Dossier pays...

_ Afghanistan ________________________


Voici 3 ans que le monde entier eut véritablement connaissance de la situation dramatique des droits des femmes en Afghanistan avec comme point culminant, "la journée de la femme" du 8 mars 1998 qui leur était consacrée sous le slogan "Des fleurs pour les femmes de Kaboul". Trois années durant lesquelles la communauté internationale, aidée par plusieurs ONG, s'est acharnée à faire reconnaître par le pouvoir en place, les taliban, ainsi qu'aux différents pays du monde, que les femmes afghanes figuraient parmi les plus discriminées de notre planète. Trois années qui ont permis également de mettre en lumière le véritable visage de ces gardiens fondamentalistes d'une loi islamique inique et meurtrière.

L'Afghanistan, pays sous-développé mais qui présentait quelque espoir d'évolution vers la démocratie au lendemain de la guerre dévastatrice qui l'avait opposé au géant communiste, est tombé, en 1996, entre les mains sanguinaires et manipulatrices des fous d'une loi coranique détournée et corrompue. La stabilisation apparente apportée par ces guerriers psychopathes, concentrant sur eux les multiples conflits factionnaires dont souffraient les diverses régions du pays, n'a fait que dissimuler la misère et la souffrance d'un peuple qui se trouve, chaque jour davantage, à l'agonie. Une agonie lente mais paradoxalement brutale car réanimée en permanence par les horreurs perpétrées à l'égard de la population afghane qui viendrait défier la loi et plus spécialement des filles et des femmes.

Pendaisons, exécutions par balle, amputations, immolations, flagellations sont les scènes abjectes que répète quotidiennement le peuple afghan sous la direction autoritaire des taliban. Mais dans ce cinéma-là, les punitions inhumaines et les mises à mort publiques sont bien réelles et définitives. A l'évidence, les filles et les femmes sont supérieurement exposées à ce type de représailles criminelles car elles font l'objet, à la base même du régime, d'une discrimination instituée, légalisée qui se révèle à travers l'anéantissement intégral de leurs droits en matière de vie économique, politique et sociale.

Et le moindre faux pas se paie cash ! La situation est bien claire : un nombre considérable de femmes n'ont plus le droit d'accéder à une quelconque forme de scolarisation au-delà de l'âge de dix ans. L'accès aux soins généraux et spécifiques leur est interdit, ce qui engendre une augmentation des maladies et plus particulièrement les rend vulnérables lors de leurs grossesses et leurs accouchements (le taux de mortalité maternelle est extrêmement élevé, situant l'Afghanistan au deuxième rang mondial). Les femmes intellectuelles ne doivent plus penser, elles doivent, comme les autres, rester cloîtrées à l'intérieur de leur maison, coiffées de la "Burka" ou du "Tchador", recouvertes entièrement de la tête aux pieds de tissus opaques. Leurs fenêtres sont parfois peintes afin de leur éviter d'êtres vues de l'extérieur ou même de voir elles-mêmes ce qui se passe au dehors. Elles n'ont plus le droit d'exercer un métier alors que certaines d'entre elles occupaient des postes importants au sein de cabinets d'avocats, d'hôpitaux, étaient également géomètres ou ingénieurs avant l'arrivée des taliban au pouvoir. Les seuls secteurs d'activités qui leur sont encore accessibles et sous la condition d'être veuves, par exemple, et d'avoir une famille à charge, sont l'agriculture et l'artisanat. A tout cela s'ajoutent les enlèvements de fillettes et de femmes, surtout hazara et tadjikes ; les mariages forcés et les trafics (la traite) à destination d'autres régions d'Afghanistan ou du Pakistan. Ainsi, toutes ces restrictions fortement appliquées dans les régions placées sous le contrôle des taliban entraînent souvent les femmes dans la pauvreté absolue, dans la dépendance totale vis-à-vis des hommes. Elles sont sujettes alors à des états dépressifs, à l'absorption exagérée de drogue, aux maladies mentales, au suicide, à la mendicité et à la prostitution. Et, pour une femme accusée de fornication, c'est la pendaison !

Tout le peuple afghan souffre de cette situation tragique. Le fait est que dans les régions reculées où les taliban n'ont pu faire autorité, les femmes subissent un peu moins l'influence de leurs lois. Elles peuvent, si elles étaient médecins, auparavant, venir en aide aux personnes malades, aux blessés. Toutefois, celles qui vivent dans les zones contrôlées par le Front Uni, faction armée opposée aux taliban, ne bénéficient pas d'un traitement bien meilleur. Elles ne peuvent circuler que sous certaines conditions déclarées "d'intérêt public" et doivent se conformer à des lois discriminatoires toutes aussi réelles et imposées.

Comme il y a 3 ans, les femmes afghanes sont toujours majoritairement privées de liberté, privées de vie. Les décrets ou les ordonnances, publiés par les ministres taliban et destinés à réduire toujours plus leur espace vital, fleurissent à mesure que les conflits internes s'enlisent et que le désir de contrôler la totalité du territoire augmente. Le nombre de réfugiés déplacés à l'intérieur du pays ou vers le Pakistan est considérable, altérant dangereusement leur état de santé et les rendant vulnérables face à toute action discriminatoire et violente. En outre, plusieurs centaines de morts ont été recensés parmi les réfugiés à cause de la précarité dans laquelle ils ont dû passer l'hiver !
C'est dans les camps de réfugiés, pourtant, que les femmes retrouvent un peu de dignité et d'identité en portant secours aux personnes malades, lorsqu'elles ont été médecins, en improvisant des "écoles", lorsqu'elles ont été, jadis, enseignantes.

Un message jeté à la face des tortionnaires que sont les taliban : le peuple afghan est un peuple de nomades, le plaçant au premier rang mondial de sa catégorie devant la Mauritanie, passé maitre dans l'art de reconstruire une oasis de vie dans un désert humain. Ce que l'armée russe n'a pu accomplir, les taliban ne le pourront également. L'économie inexistante, l'humanité bafouée, la politique de la terreur ne jouent pas en faveur des protagonistes fanatiques. Leur pouvoir est factice, ayant perdu tout contrôle d'eux-mêmes, de leurs actes alors que la surenchère de violence les rend successivement sourds, aveugles et muets. Si bien que lorsque nous ne sommes plus capables d'entendre les cris de souffrance de celles et ceux que l'on martyrise, que nous ne voyons plus les corps des agonisants que l'on écrase, nous perdons la dernière parcelle d'humanité qui demeurait en nous et, alors, notre discours sans âme reste muet, incapable d'émettre autre chose que la mort, le néant, signe que nous sommes proches de l'apocalypse…

Thierry Robin - avril 2001

Sources : ONU 2000, Rawa.org, Amnesty, womenenews, FDNW, presses diverses, UNESCO


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