Impossible d'échapper, vous en conviendrez, aux derniers
événements qui ont secoué le monde "civilisé",
le 11 septembre dernier. Aussi, s'il est indispensable de condamner
ces attentats, au nom de la vie sacrée de tous les êtres
humains de la planète, il est tout aussi primordial de se
détacher au plus vite de cet acte négatif pour tenter
d'en avoir une vision plus élevée, ce qui serait bénéfique
pour l'évolution positive de l'humanité. Soustraits
aux cris de ceux qui souffrent, étouffés eux-mêmes
par les hurlements de ceux qui réclament vengeance, nous
pouvons indéniablement entendre les voix des plus sages,
ces voix qui ont l'expérience interminable de la souffrance
vécue dans la solitude et l'ignorance du reste du monde depuis
des années. D'autres voix, également, peuvent nous
sensibiliser, celles-là qui ont ouvert leurs oreilles et
leur coeur aux autres cultures, qu'elles soient sociales ou religieuses
et qui appellent, sans cesse depuis 15 jours, à l'humilité
(non pas à l'humiliation) et à la paix.
Car en effet, deux sortes de voix se sont radicalisées
durant ces derniers jours de terreur médiatisée :
celles qui demandent réparation par la force et veulent que
la souffrance de leurs morts soit soulagée par des morts,
ailleurs. Et celles qui savent que la mort attentée d'êtres
humains ne peut être comblée que par la vie et la recherche
inconditionnelle de la paix.
Aussi, à travers la condition des femmes dans le monde, il
est rapide et facile de constater que le terrain de la violence
ne trouve pas plus de "joueurs" en Afghanistan qu'aux
Etats-Unis. Il n'y a rien de comparable, évidemment, mais
il me semblait important d'attirer l'attention sur le fait que des
femmes meurent chaque jour, autant d'une violence occidentale, dite
"civilisée", que d'une violence que certains qualifieraient
de "barbare" ! Nul doute que de cette focalisation du
monde "civilisé" sur lui-même causée
par l'affront qu'il se dit avoir subi, devra émerger l'humilité
de nous remettre en question, nous occidentaux, sur nos agissements
et sur les efforts que nous avons fournis pour nous enrichir au
détriment d'autres pays de la planète que nous avons
judicieusement exploités et participé à appauvrir.
Je veux parler bien entendu des personnalités qui ont l'apanage
du pouvoir. Nul doute qu'il faudra construire la paix dans nos propres
pays et dans le coeur de nos compatriotes avant de tenter toute
forme d'éducation "à la paix" au-delà
de nos frontières, auprès de ces contrées que
nous jugeons rétrogrades comparées à nos sacro-saintes
valeurs occidento-capitalistes. Ainsi, alors que nous avons conscience
qu'aucune guerre n'a de légitimité - si nous considérons
que toute vie humaine est sacrée et que d'autres solutions
pacifiques peuvent être développées avec de
la volonté et sans les pressions opportunistes des industries
de l'armement - nous réaliserons que punir l'autre, l'indésirable,
le belliqueux, le barbare, c'est nous punir nous-mêmes de
nos propres imperfections et de nos mauvais sentiments, souvent
biens cachés derrière notre bonne conscience. Aussi,
lâcherai-je cette phrase simple que bon nombre de nos dirigeants
devraient se répéter à longueur de journée
: "on ne voit les autres qu'à travers soi-même
!"
Cette réflexion humble éviterait, peut-être,
des jugements hâtifs, de l'arrogance et des actes incontrôlés
capables de générer une négativité tout
aussi tragique que celle contre laquelle nous croyons avoir le devoir
de nous dresser. Si nous nous affirmons "civilisés",
alors nous devons être, plus que quiconque, conscients et
responsables de nos actes à l'égard de l'humanité.
Thierry Robin - septembre 2001
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