Le sommet du G8, qui s'est tenu à Kananaskis, une petite
station située au fin fond de la province de l'Alberta au
Canada, choisie pour échapper à la colère des
opposants à la mondialisation libérale, a réuni
pour la première fois de son histoire quatre représentants
de plus que les huit protagonistes habituels.
Parce qu'ils sont les initiateurs d'un plan de développement
pour l'Afrique et que leurs appels à l'aide répétés
ont enfin trouvé une oreille pour les entendre, Messieurs
Thabo Mbeki (Afrique du Sud), Olusegun Obasanjo (Nigeria), Abdelaziz
Bouteflika (Algérie) et Abdoulaye Wade (Sénégal)
ont été conviés à cette réunion.
Bien entendu, l'avenir de l'Afrique a été au centre
des discussions et des débats. En effet, comment nous occidentaux,
responsables en grande partie de l'exploitation inavouable des richesses
humaines, du sol et du sous-sol africain, pouvons-nous participer,
aujourd'hui, à la reconstruction et à l'essor de ce
continent déchiré politiquement et dont l'économie
a été décimée ?
Selon les observateurs des droits humains et des
causes humanitaires, la bonne conscience a été
le moteur essentiel du Sommet de Kananaskis réunissant les
huit plus grandes puissances économiques mondiales. Et le
résultat fut malheureusement à la hauteur des désillusions
redoutées. Les chiffres parlent d'eux-mêmes ! Alors
que certains experts en recherche agronomique pour le développement
estiment que l'Afrique n'a d'avenir qu'en recevant une aide annuelle
mondiale de 30 milliards de dollars, le G8 lui accorde 12 milliards
de dollars sur dix ans. De son côté, la Russie, qui
sera contre toute attente à la présidence en 2006,
reçoit, elle, 20 milliards de dollars sur 10 ans pour démanteler
son arsenal d'armes chimiques et nucléaires et réinsérer
ses scientifiques, experts en armement. Aucune contre partie ne
lui a été réclamée, tout au moins officiellement.
Pour ce qui est de l'Afrique, certains parlent d'effet d'annonce
ou de gesticulation médiatique. Mais de grands
projets de soutien au développement spécifique des
atouts africains, notamment l'agriculture, avec pour seul intérêt
l'Afrique et ses peuples, il n'en a point été question
!!! Sans doute cela est-il dû à l'effet direct des
retombées d'une forme de mondialisation qui ne sert, tout
le monde le sait, qu'à enrichir des pays qui le sont déjà.
Toujours est-il que des solutions existent pour permettre
à l'Afrique de sortir de l'ornière, si telle était
la volonté des pays riches. Deux tiers des Africains sont
agriculteurs. Aucune aide ne leur est attribuée. Comment
d'ailleurs un pays endetté pourrait-il accorder les subventions
nécessaires au développement de son secteur d'activité
majeur ? La mise en place d'un circuit global de commerce
équitable entre l'Afrique et les pays qui vivraient
de son activité et de ses produits constituerait un premier
pas vers une économie mondiale plus juste. L'Afrique est
l'affaire de tous parce que tous en ont fait, un jour, leur affaire.
Tous les pays, et il y en a beaucoup en occident, qui sont responsables
de l'état actuel de ce continent, devraient participer activement,
comme le réclament ses représentants, à passer
d'une logique d'assistance à une logique de partenariat.
Car, soyons réalistes, l'assistanat permet de contrôler,
de garder la main mise sur un pays que l'on soumet économiquement
et politiquement. Le partenariat, lui, sous-entend de considérer
l'autre comme son égal, tout au moins d'un point de vue humain,
et qu'il n'est alors plus question d'exploitation, de soumission,
de dettes...
Il existe plusieurs formes modernes d'esclavage du
peuple noir d'Afrique. L'assistanat en est une. Ce que réclament
les Africains aujourd'hui, ce n'est pas d'accéder à
notre richesse, non, c'est, dans un premier temps, qu'ils puissent
être considérés comme nos partenaires et que
nous leur rendions la dignité humaine que nous leur avons
volée et que nous salissons depuis trop longtemps.
Thierry Robin - juillet 2002
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